Gao : Célébration de la journée internationale des droits de l’homme



La Journée internationale des droits de l’homme a été célébrée le 10 décembre 2016 à l’Ecole des Infirmiers de Gao en présence des Représentants du Gouverneur de la Région et de la Directrice régionale de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille.  Les associations de jeunes et de femmes, les associations de défense des droits de l’homme, les étudiants et les médias ont pris part à cet évènement.  La division des Droits de l’Homme et de la Protection de la MINUSMA à Gao a remporté son pari de la mobilisation.
 
Le slogan 2016 de la Journée des droits de l'homme - « Défendez les droits de quelqu'un aujourd'hui ! » était inscrit sur tous les tee-shirts blancs portés par les participants qui ont écouté avec un intérêt tout particulier les messages du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, et celui du Secrétaire général des Nations Unies ; messages dédiés pour ladite journée. 
 
Cette célébration était également une excellente occasion de renforcer la sensibilisation aux questions des droits de l’homme à travers une conférence-débat sur « le rôle des défenseurs des droits de l’homme en matière de protection des victimes » ; session facilitée par M. Omorou Touré, coordinateur de DEME SO, une association née en 1991 à l’initiative de jeunes juristes maliens dont son principal objectif est la promotion et la protection des droits humains au Mali.  Sa présentation, faite en français et dans la langue locale sonrhaï, portait principalement sur les mesures de protection des victimes et des témoins. 
 
Pour joindre l’utile à l’agréable, les participants ont esquissé des pas de dance ‘Takamba’ avec la musique du groupe musical ‘Super Onze’.  Le takamba est une musique et une danse qui porte le nom du village dont il est issu, dans la région de Gao. C’est une sorte de Zouk à distance dansée avec beaucoup de souplesse, de finesse et d’élégance sous les sonorités du n’goni (guitare traditionnelle) et des calebasses.
 
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A l’occasion de la célébration de la Journée internationale des droits de l’homme, Mme Ndeye Yande Kane, cheffe de la division des Droits de l’Homme et de la Protection à la MINUSMA à Gao, a donné une interview dans laquelle elle parle de la situation des droits de l’homme dans la région de Gao.
 
 
Avant de vous faire un aperçu de la situation des droits de l’homme ici à Gao, je souhaiterai parler un peu du 68ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme en faisant un bilan.  Et ce bilan sera fait à partir d’incertitudes, d’interrogations : Où en sommes-nous en termes de l’égalité de genre ? Où en sommes-nous en termes de l’accès à la justice, à l’éducation, à la santé et à l’accès au travail ? Soixante-huit ans après, nous nous sommes  rendus compte que c’est un document qui est à la base de la constitution et des textes nationaux de tous les pays du monde.  Cependant vous allez vous rendre compte qu’il y a un écart entre les textes qui sont ratifiés et les réalités du terrain car nous avons un problème de conformité entre les textes nationaux et les traités internationaux.
 
Quelle est la situation actuelle des droits de l’homme dans la région de Gao ?
La situation des droits de l’homme actuelle est caractérisée par des attaques asymétriques contre les forces tant internationales que maliennes, par des actes de  terrorisme, l’impunité à travers les mesures de confiance de l’Accord de paix qui font que certains auteurs présumés échappent à la justice, mais également par l’atteinte à la liberté de circulation des populations.  Et comme vous le savez, quand il y a insécurité, la population ne peut pas circuler librement et n’ont pas accès aux instances judiciaires qui sont très éloignées des populations.  Les victimes sont là et veulent dénoncer, porter plainte, mais à qui vont elles se confier ?  La situation des droits de l’homme est aussi caractérisée par des problèmes actuels liés à la protection des civils, ces derniers vivent dans des endroits éloignés et non sécurisés. Les forces internationales, particulièrement la MINUSMA, souhaiteraient aller dans ces zones enclavées en vue de sécuriser la population et mettre en œuvre leur mandat de protection des civils, mais elles sont limitées par des problèmes logistiques. 
 
La MINUSMA travaille avec ses partenaires pour assurer une bonne relève…
Notre travail ne s’arrête pas seulement à rapporter ou dénoncer, mais nous travaillons beaucoup plus dans  la sensibilisation de nos partenaires des défenseurs des droits de l’homme, et de la population afin de préparer la relève.  Comme vous le savez, un jour la MINUSMA va fermer ses portes, sa division des Droits de l’Homme et de la Protection ou toute autre section/division va quitter et c’est dans ce contexte qu’elle pourra assurer la continuité, la durabilité et l’appropriation. Et là, je vais vous donner un exemple : nous avons récemment mis en place un cadre de concertation sur  la justice transitionnelle pour faciliter les victimes à dénoncer tous les abus dont elles ont été victimes depuis 2012. 
 
Dans le cadre de la lutte contre l’impunité, la division des Droits de l’Homme et de la Protection documente toutes les violations et abus qui sont commis. Le moment venu et quand les institutions seront en place et les juges déployés dans les endroits enclavés où règnent l’insécurité, le dysfonctionnement du système judiciaire trouvera une solution. Les juges sont tous présents dans la ville de Gao, mais ne peuvent pas aller sur le terrain à cause de l’insécurité.  J’insiste encore que nous voulons bien aller au-delà de la ville, au-delà des chefs-lieux de cercles, mais parfois nous sommes butés au problème d’insécurité qui fait que nous ne pouvons pas avoir accès aux victimes.
 
Les victimes des violences et des violations des droits humains doivent savoir à quel saint se vouer !
Ce n’est pas facile.  C’est vrai que nous avons mis ce cadre pour travailler, mais je vais commencer avec les autorités judiciaires.  Dans le cadre de cette collaboration, de notre côté, c’est pour s’assurer d’une bonne administration de  la justice afin de mettre un terme à l’impunité, c’est-à-dire du pré juridictionnel au juridictionnel, les dossiers doivent être traites avec célérités par les autorités judiciaires  afin de s’assurer que les auteurs présumés sont arrêtés, jugés et condamnés selon la loi.  
Mais l’immense défi est celui d’atteindre ces endroits et  les victimes.  Vous savez très bien que les victimes sont parfois démunies et ont du mal à s’acquitter des frais de justice et des frais de transport.  Leur demander de venir jusqu’à Gao où se trouvent les instances judiciaires, c’est beaucoup trop leur demander. 
Aussi, il y a des risques pour elles. Généralement, la population vivant dans les zones enclavées ne jouit pas  de sa liberté de mouvements et de circulation à cause de l’absence de l’autorité de l’Etat et de l’insécurité qui règne dans certaines zones reculées. Il faut que le processus démarre.  Une fois que le processus de l’Accord de paix est en place, les autorités judiciaires pourront être déployées sur le terrain. En ce moment-là, elles seront plus proches de la population. Dans certains endroits, des abus sont commis en toute impunité  à cause de l’absence de l’autorité de l’Etat
Trouver des partenaires fiables est un immense défi à relever
Il n’est pas  facile de trouver des partenaires fiables dans la région de Gao.  Il y a quelques ONG qui œuvrent dans le domaine des droits de l’homme et qui déploient tous leurs efforts en vue d’y parvenir, mais ne répondent pas toutes aux besoins spécifiques des victimes par manque de moyens logistique pour atteindre les victimes ou à cause de l’insécurité.  C’est un immense défi à relever. Toutefois, beaucoup d’ONG n’existent que de nom et ne jouent vraiment pas leur rôle de défenseurs des droits de l’homme.
Le défenseur des droits de l’homme doit être assez proche des victimes
Etre proche des victimes veut dire rester en contact avec elles, suivre leurs dossiers auprès des instances judiciaires et ne pas se limiter à la collecte de l’information. Ce contact permanent permettra de donner confiance aux victimes
Mon dernier message
Mon souhait est que le système judiciaire dans la région de Gao soit, le plus vite, opérationnel dans les zones enclavées où règne l’insécurité pour que les victimes aient facilement accès à la justice. Certaines victimes doivent se rendre à Bamako.  Il serait souhaitable que les autorités judicaires se saisissent d’office des cas et aillent vers les victimes.
END
 


 
 

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